mercredi 31 janvier 2007

Bechalah - Quand la route se referme...devant la mer

Ca y est !

On est enfin sorti d'Egypte. Après certes un petit coup de main de notre Dieu tout puissant, nous voilà partis.
Mais, évidemment, tout ne peut pas être rose, il y a un hic. On se retrouve devant la mer, et personne n'a pensé ni au bateau, ni à l'équipage ni à Isaac le barman (de la Croisière s'amuse...).

On est dans le cas typique d'un monde non parfait, dans lequel l'emmerdement est maximum: situation qui, vous en conviendrez, arrive relativement souvent...

Et puis, voyons ce que dit le dernier Rabbi de Loubavitch au sujet de cet épisode de la mer.

D'abord, le Midrach raconte quelque chose que vous pouvez retrouver dans tous les bons livrets d'office de mouvements de jeunesse: Il y avait 4 groupes, représentant 4 opinions différentes sur la stratégie à adopter. En gros, voilà ce que ça donne:
1) Allons nous noyer dans la mer, au moins ils ne nous auront pas...
2) C'était bien tenté, mais là il n'y a pas trop le choix, il faut continuer à vivre et donc rentrer en Egypte.
3) On a pas fait tout ça pour rien: Battons-nous !
4) Tournons nous vers D-ieu et prions mes frères.

Alors, vous auriez choisi quoi ? Moïse réfute les 4 options. Regardons dans le texte. Il dit la chose suivante: "Moïse répondit au peuple: Ne craignez rien, restez en place, et regardez la délivrance que l'Éternel va vous accorder en ce jour; car les Égyptiens que vous voyez aujourd'hui, vous ne les verrez plus jamais.L'Éternel combattra pour vous; et vous, gardez le silence."

Dans sa phrase, il répond à chacun des groupes. Il a une réponse adaptée à chacun des groupes.

Aux 1) qui voulaient se noyer:"Ne craignez rien, restez en place, et regardez la délivrance que l'Éternel va vous accorder en ce jour"

Aux 2) qui voulaient retourner en Egypte:"car les Égyptiens que vous voyez aujourd'hui, vous ne les verrez plus jamais"

Aux 3) qui voulaient se battre:"L'Éternel combattra pour vous"

Aux 4) qui voulaient prier:"et vous, gardez le silence." (comme ça c'est clair...).

Ce que répond D-ieu, c'est: "Pourquoi ils chipotent ? Parle leur et qu'ils avancent !"

Le Rabbi de Loubavitch interprète ces 4 réponses comme des réponses à des attitudes parfois tout à fait louables. Celui qui veut se noyer, c'est en fait celui qui veut se plonger dans la Thora (la Thora étant comparée à l'eau), dans les études talmudiques, et refuser d'affronter ce monde. C'est celui qui veut se couper du monde matériel et "s'immerger" dans le monde spirituel, beaucoup plus cohérent et accueillant...

Celui qui veut retourner en Egypte comprend qu'il ne peut pas échapper au monde matériel et qu'il faut assumer de vivre dans un monde violent et injuste. Mais il essaie de limiter les dégâts en se soumettant à la loi du plus fort et en essayant de diffuser l'éthique juive au sein des nations.

Celui qui veut se battre refuse cette aliénation. Il pense qu'il y a quelque chose à faire pour changer le monde. C'est le militant par excellence, il descend dans la rue, met au point des opérations commandos pour faire triompher la justice et l'idéal juif.

Celui qui veut prier, est conscient de la réalité de ce monde, mais il sait qu'une force supérieure et spirituel existe. Il veut aussi changer le monde, mais à sa manière. En priant. En étudiant. C'est un non-violent. Et en bon Hassid, il est convaincu qu'une prière, même basique, dite du fond du coeur, peut changer le monde plus profondément que de grandes manifestations.

Chacune de ses attitudes est légitime et valable. Elle peut avoir sa place dans un contexte bien précis. Mais avant toute chose, ce qu'il faut avoir en tête, c'est qu'il faut avancer. "VeIsaou": et ils avanceront.Bien sûr qu'il faut conserver la spiritualité juive en s'y immergeant.Bien sûr qu'il faut aussi être une lumière pour les nations.Bien sûr qu'il faut se battre pour affirmer notre spécificité.Bien sûr qu'il faut prier.Mais toutes ces démarches ne sont valables que si l'objectif est bien défini: il faut avancer (les Loubavitchs diraient: vers la venue du Machiah !).

Retourner en Egypte pour créer un statu-quo, ça c'est anti-juif. Se battre pour l'honneur sans voir ce qu'il y a après, c'est aussi anti-juif. Pareil pour ceux qui se réfugient dans l'étude ou qui prient à longueur de journée sans réfléchir à l'objectif de leurs actes. Certains penseurs identifient ces 4 groupes à ce qu'on peut trouver au sein du peuple juif: des religieux qui étudient dans les shtetl, des universalistes, des sionistes, des hassidim illuminés...Chacun a sa pierre à apporter, mais seulement s'il a conscience qu'il doit avancer vers un objectif bien défini.

Au sein de la communauté juive française, et du monde juif de façon plus générale, c'est évidemment pareil. On n'a pas tous la même façon d'aborder l'éducation juive, notre relation au judaïsme, à Israël.

Mais ce que dit notre Paracha, c'est que notre perception n'est valable que si l'on est convaincu qu'elle va faire avancer les choses.

jeudi 18 janvier 2007

Vaéra - La plaie du sang et le rôle du Alef

Comme on l'a dit au début de ce blog, l'idée est de faire découvrir des approches différentes des commentaires de la Thora.




Et comme il y a beaucoup de matheux en France et qu'en France, on aime bien les jeux, on va faire un petit tour du côté de la Guematria.


Applaudissements dans la salle, car en général les gens aiment bien ces petits jeux numériques qui font se rapprocher des mots et des sens apparemment très différents... Mais attention, nous dit la Michna, la Guematria n'est que la cerise sur le gâteau, de petits exercices pour kiffer, n'allez pas prendre trop au sérieux ces jeux mathématiques, vous risqueriez de vous jeter sur la suite des 'Codes de la Bible...' (que D.ieu vous protège de telles âneries).




On va quand même d'essayer d'y avoir recours pour expliquer un midrach bizarre sur la première plaie d'Egypte relatée dans cette Paracha: le sang.


Le Midrach nous raconte que non seulement le Nil s'est effectivement transformé en sang, mais qu'en plus, toute l'eau des Egyptiens se transformait en sang, alors que l'eau des hébreux restait de l'eau. Mais ce 'miracle' arrivait même dans les verres d'eaux ! Il suffisait qu'un Egyptien avale un verre d'eau pour que celui-ci se transforme en sang, alors que pour les hébreux, un verre d'eau restait un verre d'eau... Passe encore l'explication scientifique pour le Nil qui est devenu rouge à cause d'une roche rougeâtre (y en a qui ont vraiment rien à foutre de leur vie...ou qui n'ont pas encore compris que la Thora n'est ni un livre d'histoire, ni un manuel scientifique), mais là c'est plus du rationnel, c'est de la science-fiction !




Essayons donc de comprendre ce midrach sans avoir recours à certaines techniques de prestidigitation, pourtant souvent fort utiles... Je mets l'alphabet hébraïque ci-dessous pour que tout le monde puisse suivre.






En hébreu, un homme se dit ADAM et s'écrit avec 3 lettres: Alef, Dalet et Mem.


Ce mot est constitué de 2 parties: A et DAM. Alef d'un côté et Dalet, Mem de l'autre. Or DAM, veut dire Sang. Un homme, c'est quelqu'un qui relie son existence matériel (le sang, DAM) à un objectif spirituel, à une âme, materialisée par le Alef, première lettre de l'alphabet et symbole du Dieu unique.


La légende veut que le Golem fut créé à l'aide du mot EMET (Alef, Mem et Tav), voulant dire vérité. Pour anéantir le golem, il suffisait d'effacer la lettre Alef pour laisser le mot MET, voulant dire 'Mort'. Le Alef représente donc bien le souffle de vie permettant à l'homme d'aller vers un idéal et d'accomplir un objectif spirituel.



C'est donc ça que la plaie du sang veut dire: 'vous les Egyptiens, à part profiter de la vie et vous prélasser au bord du Nil, de quoi êtes vous capables ? Pouvez-vous vous libérer ?' Car la libération, c'est ça que les hébreux veulent et vont obtenir.


Voyons de plus près maintenant la Guematria, la technique qui associe des chiffres à des lettres, comme le montre le tableau ci-dessous:




La libération, c'est la GEOULA en hébreu(valeur numérique = 45). Si on enlève le Alef au mot GEOULA, on obtient GOLA (valeur numérique = 44), qui veut dire exil.



La différence entre l'exil et la délivrance ne tient que dans le Alef ! Elle ne tient que dans ce qu'on veut faire de sa vie !



Poursuivre un idéal ou rester pépère à profiter du ciné et des fringues (que ce soient des keffieh ou des jeans Diesel d'ailleurs ) ?


Et regardez comme c'est joli: la valeur numérique de DAM (sang) est la même que celle de GOLA (Exil) : 44

Et la valeur numérique de ADAM (l'homme) est la même que celle de GEOULA (Délivrance) : 45



Soit tu es un homme et tu cherches la liberté. Soit tu n'est qu'un tas de chair pépère avec une vie tranquille et tu ne connaîtras jamais les plaisirs de la délivrance...

Dans une vie antérieure, dans un mouvement de jeunesse, à l'issue d'un stage de formation pour les cadres, un animateur me demanda comment monter une nouvelle structure locale du mouvement. La vérité, c'est que je n'en savais fichtrement rien. Mais je lui ai quand même dit la chose suivante: 'si tu créés un local, juste pour faire un local de plus qui accueille des enfants le dimanche, ca n'ira pas bien loin. Il faut que tu crées ce local en pensant à un objectif bien précis, en pensant que tu vas faire de ce local quelque chose d'unique et de novateur ! Et là déjà, c'est bien parti...car en plus des structures matérielles, on y a rajouté le Alef, une âme de GL !'



Voilà comment la Guematria, cette cerise sur le gâteau, peut nous faire toucher du doigt certains enseignements longuement développés par ailleurs par nos maîtres...

mercredi 10 janvier 2007

Chemot - La richesse de l'exil

Chemot, c'est le passage de l'histoire d'une famille (celle de Jacob) à celle d'un peuple. Et ce peuple se forme en Egypte, en exil.
Quelle valeur accorder à cet exil ? Punition ? Bienfait ? Quoi y faire ?

Pour y répondre, nous nous pencherons sur un commentaire a priori anodin du Baal Hatourim, ouvrage portant sur la Thora écrite (le Pentateuque) et très friand d'explications utilisant la Guematria (l'affectation de combinaisons numériques aux mots de la Thora) ou les Raché-Tevot (les acronymes).

Et sur Chemot, le Baal Hatourim a une explication surprenante: "Le mot Chemot forme les initiales de l'expression Chnaïm Mikra ekhad Targoum".
Traduction: les lettres du mot Chemot (Chine, Mem et Tav) forment les initiales de l'expression Deux lectures et une traduction.

En clair ? Il s'agit d'une Mitzva pas forcément très connue, qui consiste à lire chaque semaine avant Chabbat:
- deux lectures de la Paracha en hébreu,
- plus une lecture du Targoum, c'est-à-dire la traduction du texte en araméen réalisée par Onkelos.

Bon fort bien. Mais quel est le sens de ce commentaire ?

Il est en fait fondamental pour tous les Juifs qui vivent en exil et l'on sait qu'il y en a eu un paquet durant l'histoire. Ce commentaire nous dit 3 choses essentielles:

  1. Chemot représente, on l'a dit, l'entrée du peuple Juif en exil, dans son premier exil, celui qui sera la matrice des suivants. Et pour qu'un Juif survive en exil, il lui faut un secret. Ce secret, nous dit le Baal Hatourim, c'est l'étude. C'est l'action de ne jamais se séparer du texte, de toujours l'entretenir, toutes les semaines, sans exceptions.
  2. Mais cette lecture ne suffit pas. Il existera des périodes en exil, où la lecture de la Thora ne signifiera plus rien pour les Juifs. Où le message apparaîtra comme poussiereux et archaïque. Où des idéologies (christianisme, marxisme, psychanalyse,...) pourront apparaître comme des dépassements du judaïsme. Alors, nous dit le Baal Hatourim, il est essentiel de ne pas oublier le Targoum, c'est à dire de prendre la peine de "traduire" en langage intelligible pour le lieu et l'époque, le message de la Thora.
  3. Mais ça ne suffit toujours pas ! Car comme le dit l'adage bien connu, "Traduttore, tradittore", traduire c'est trahir. Et certaines lectures modernes de la Thora, en voulant rendre de nouveau audible son message, prennent le risque de produire des contre-sens et d'aspirer plutôt à un conformisme d'époque en totale contradiction avec l'identité intemporelle et subversive du judaïsme. Il faut donc une deuxième lecture en hébreu, qui puisse nous assurer de l'authenticité de l'interprétation et de son désinteressement.

Cette démarche dialectique: Etudier/ En renouveler le sens/ Vérifier la validité de l'interprétation, est le secret de la survie en exil, mais aussi et surtout sa richesse. Car c'est bien cette situation qui a permis la production jamais interrompue des trésors de l'herméneutique juive.

Pour finir, un petit mot de halakha sur ce sujet. Car, me direz-vous, l'explication est bien gentille, sauf qu'aujourd'hui les Juifs bilingues hébreu-araméen, ça ne court pas les rues.

Première réponse: eh bien, il n'est jamais trop tard pour bien faire et commencer la méthode Assimil araméen.

Deuxième réponse: le Choulhan Aroukh a un "hidouch", une innovation stupéfiante sur cette halakha. Le Targoum en araméen est évidemment valide pour accomplir la Mitzva pré-citée. Mais une autre lecture est possible qui nous rend quitte de la Mitzva: l'étude du commentaire de Rachi. Lire le texte en hébreu, puis le commentaire de Rachi, puis enfin relire en hébreu la paracha nous rend quitte de cette Mitzva. Un auteur du 11ème siècle fait figure de référent halakhique pour une Mitzva donnée, c'est une magnifique nouvelle pour tous les adorateurs de la belle région champenoise...

Nota: Ce commentaire repose en grande partie sur des éléments apportés par un ami, Benjamin Sznajder

dimanche 7 janvier 2007

L'héritage nu d'Aharon Appelfeld

Comme peut-être beaucoup de gens, certaines discussions, commémorations ou lectures portant sur la Shoah me mettent mal à l'aise.
Je comprends ceux qui vont aduler Primo Levi et recommander à toutes leurs connaissances la lecture de Si c'est un homme. Mais je le dis honnêtement, ce livre ne me satisfait pas. Il est essentiel en ce qu'il décrit précisément la vie quotidienne d'un camp de concentration adossé à un camp d'extermination dont les cheminées ne cessent de cracher leur fumée morbide.
Il est essentiel en ce qu'il permet de toucher partiellement du doigt les effets inhabituels d'une plongée au sein de l'enfer pour des êtres humains finalement "normaux".
Mais ce livre oublie de poser des questions: pourquoi suis-je ici ? Que doit-être ma vie après ?
Ces questions, Le Pianiste (Wladislaw Szpilman), qu'on a pu voir à l'écran dans le film de Roman Polanski, ne se les pose jamais. Après la guerre, après le Ghetto de Varsovie, il retourne en Pologne reprendre sa petite vie de chef d'orchestre.
Je le dit avec beaucoup de recul ainsi qu'avec beaucoup de respect pour leur expérience unique: je ne comprends pas comment une traversée pareille n'a pas déclenché en eux un questionnement profond sur ce qu'était qu'être Juif. Est-ce par instinct de protection, pour ne pas devenir fou comme ces héros de Kafka qui ne savaient pas bien ce qu'on leur reprochait ?

Et alors que sur les bourreaux, la réflexion n'a jamais été aussi présente (depuis Hannah Arendt jusqu'aux Bienveillantes), je n'ai en fait pas l'impression que le questionnement sur la spiritualité juive des rescapés de la Shoah ait été jamais abordé, si ce n'est par des clichés faciles et forcément biaisés (Où était Dieu pendant la Shoah ? Les rescapés ont coupé tout lien avec Dieu, etc, etc....).

Et puis vint Aharon Appelfeld. Une illumination. Déjà dans Histoire d'une Vie, il aborde ce sujet avec beaucoup de délicatesse, ce qui n'exclut pas une fulgurance évidente.
Mais dans L'héritage nu, petit livre de 94 pages aux éditions de l'Olivier, Appelfeld signe et m'apaise. Enfin quelqu'un qui sort des discours convenus sur la Shoah et les rescapés. Sur leur identité juive avant la Shoah et leur identité juive après la Shoah. Dans trois conférences retranscrites dans ce recueil, Appelfeld dit des choses qui n'ont encore jamais été dites auparavant, mais qui méritent d'être scrutées.

D'abord sur l'avant Shoah: "Les années 1920 et 1930 se lancèrent dans l'assimilation. L'émigration en masse, le communisme et un effondrement interne minèrent le judaïsme d'Europe de l'Est et menacèrent de le réduire à rien. L'assimilation était partout. En vérité, les grandes communautés , aux racines anciennes et profondes, maintenaient encore les formes traditionnelles, mais c'était par inertie et non sous l'effet d'une force intérieure. C'était le stade final et difficile de la transition entre une unité tribale religieuse et la petite bourgeoisie moderne."

Les Juifs étaient devenus des petits-bourgeois qui avaient oublié ce qui avait fait la force et la subversivité du judaïsme. Appelfeld cite un passage de la Lettre au Père de Kafka, qu'on devrait faire lire à tout père de futur Bar-Mitzva.
Sa description des Juifs assimilés ressemble également étrangement à certains autres Juifs assimilés, séfarades cette fois, arrivés en France dans les années 60:

"Pour ma génération, l'assimilation avait cessé d'être un but, c'est devenu un way of life, si l'on peut dire. Il y avait bien, c'est vrai, quelques vestiges d'existence juive qui frémissaient encore, mais ils étaient sans vie. Le juif petit-bourgeois se considérait libre des anciennes traditions et, par conséquent, c'était un candidat potentiel au monde de la Haute finance, à la médecine, au droit, à l'industrie. Dans la pensée petite-bourgoise, il n'y avait alors, pas plus qu'aujourd'hui, de place consistante pour le judaïsme. Le judaïsme était considéré comme un anachronisme dont il était difficile de se débarrasser complètement. "

La Shoah survint, et elle fut pour ces Juifs assimilés un terrible révélateur, un miroir qui posait une question en plus d'un reflet: pourquoi moi qui ai abandonné toute trace de judéité ?
Aharon Appelfeld, tout en constatant l'absence béante de questionnement chez les survivants, qui se "contentent" d'un témoignage le plus factuel possible, propose l'art comme mode d'expression qui puisse donner à penser cet évènement du point de vue de l'individu, de ses craintes et bien sûr de ses refoulements.

Mais Appelfeld va plus loin, notamment dans la 3ème conférence du livre. Il prend très au sérieux les comportements parfois inouïs de certains Juifs qui tenaient à conserver le joug divin même dans un endroit où nul trace de Dieu ne semblait se faire sentir.

"Qui a traversé la Shoah n'oubliera jamais les cris de "Ecoute Ô Israël" qui fracassèrent l'air et ebranlèrent le sol. (...) Le juif n'affrontait pas seulement les nazis mais aussi sa propre judaïté, qui le hantait. La brûlure intérieure n'était pas moins vive que dehors celle des flammes. (...) Nous vîmes clairement pendant la Shoah, comment les juifs pratiquants élevèrent les commandements à un degré de pureté absolue. Nous vîmes comment l'observance des pratiques religieuses, la pratique de la cachrout, le shabbat, la prière à l'heure voulue, n'étaient pas que les piliers de la religion, ils devinrent les colonnes de feu qui illuminèrent l'obscurité où se trouvaient ceux qui n'avaient jamais connu auparavant, dans leur vie, les commandements du judaïsme."

Compte-tenu de la dimension sociale et politique que l'expression a prise, Appelfeld hésite à utiliser le terme de "Hozer Bitchouva" et son hésitation est tout à fait légitime et compréhensible. Mais c'est bien de cela dont il s'agit: un retour à une vieille connaissance qu'on avait enfoui au plus profond. Et désormais "l'exigence de sens se fait plus pressante".

Je l'ai dit, certaines manifestations commémoratives de la Shoah me mettent mal à l'aise. Mais comment aurais-je pu penser qu'un écrivain pût exprimer avec autant de clarté et de lucidité ce sentiment diffus de décalage ? Comment écrire cela sans s'appeler Aharon Appelfeld:

"Comment, après tant d'années dans l'intimité de la mort, les créatures que nous étions devenues ont-elles pu se métamporphoser en petits-bourgeois, confortablement installés, sans vision sprituelle, profondément absorbés dans la routine ?
La grande expérience, parce qu'elle ne fut jamais assimilée, a parfois transformé ceux qui l'ont connue en caricatures. On les rencontre, ces caricatures, un peu partout: dans des conférences universitaires, des symposiums, des cérémonies commémoratives, des banquets. Je me souviens d'une cérémonie à laquelle assistaient des déportés d'Auschwitz. Les hommes étaient élégants, des femmes des portaient des parures d'or. Il y avait sur la table des mets délicats et, entre deux services, les gens racontaient ce qu'ils avaient connu, faisaient des discours, ils distribuaient des subventions et évoquaient leurs prochaines vacances en Israël. Cela peut, d'un certain côté, représenter une sorte de vie, une vie dont on devrait être reconnaissant, mais d'un autre côté, c'est simplement une caricature absolue de la vie."

Dès lors, je comprends mieux le recul et la distance de Benny Lévy dans Etre Juif (ed. Verdier), vis-à-vis de Primo Levi et de son jugement d'un certain Kuhn, qui continuait à prier dans sa baraque.

Comment transformer en vision spirituelle les couches profondes qu'a ramenées au jour la Shoah, demande Appelfeld à la fin de l'ouvrage ?

Les bruits faits par les enfants dans les maisons d'études, insensibles au brouhaha du monde, me semblent être une première étincelle de réponse.

mercredi 3 janvier 2007

Cheela ou Techouvot

Ce sont des sites qui suscitent l'étonnement, voire le rejet de tous ceux, Juifs ou non-Juifs qui ne sont pas familiers avec la logique interne du système halakhique et de son importance capitale dans la survie du judaïsme.

1) Ai-je le droit de secouer ma nappe à l'extérieur de mon balcon le jour du Chabbat ?
2) A-t-on le droit de consommer de la nourriture le jour du Chabbat issue d'un réfrigérateur qui s'éclaire lorsque la porte s'ouvre ?
3) Lorsqu'un steak a été servi dans de la vaisselle destinée à des mets lactés, puis-je manger le steak ? Puis-je conserver l'assiette si le steak était à moins de 45° ? Cela change-t-il quelque chose si l'assiette n'avait pas été utilisé pendant 24 heures antérieures ?

Sans préparation sérieuse et érudite, c'est sûr, cela surprend. Nous consacrerons d'autres billets au système halakhique qui a donné lieu à des développements tout à fait passionnants, y compris pour nos consciences occidentales.

Mais ce qui m'intéresse ici, c'est de me pencher sur les deux principaux sites pourvoyeurs de réponses halakhiques (en hébreu Cheelot ou Techouvot) en langue française. L'idée n'est pas nouvelle, les responsa de décisionnaires sont un usage extrêmement ancien. Sur Internet, l'habitude avait déjà été largement initiée par des sites israéliens et américains, mais l'examen des deux sites dont nous parlerons nous renseigne assez bien sur une certaine sociologie du judaïsme francophone, de ses liens avec Israël et de certaines approches parfois très divergentes.

Le premier est le bien connu Cheela.org (www.cheela.org)


Au début, une initiative bénévole réalisée par des rabbins francophones vivant en Israël, visant simplement à rendre service pour certains cas halakhiques. Et puis le site a pris de l'ampleur, jugez plutôt: plus de 11000 membres inscrits, plus de 30000 réponses déjà données, l'équipe de réponse s'est étoffée pour arriver à près d'une vingtaine de contributeurs, certains s'étant spécialisés dans des domaine précis (pensée juive, conversions, etc...)
L'ergonomie du site est très agréable, claire et efficace. De nouvelles fonctionnalités ont fait leur apparition, tel le Cheela Express 48 pour les questions nécessitant une réponse urgente.
Des bénévoles, mais un réel travail de professionnel. Les rabbanim répondant au site, malgré des parcours divers, ont cependant tous un point en commun: ils habitent en Israël.
Cheela est un site de questions/réponses pour francophones fait par des israéliens. La nuance a son importance, on va le voir.

Le deuxième site, Techouvot.com (www.techouvot.com) est en fait une émanation de l'association Bné-Thora qui publie également le site Chiourim.com (www.chiourim.com). La technologie est plus rustique (c'est le système du forum php qui est utilisé), les questions sont beaucoup moins nombreuses, mais le site a tout de même acquis une belle réputation sur un domaine nécessitant une expertise pointue ainsi qu'une bonne connaissance du marché français: la cacherout.
Disposant de l'intervention du Dayan Wolff, spécialisé dans les halakhot de cacherout, Techouvot en vient même parfois à concurrencer certaines décisions du Beth-Din de Paris. Un exemple parmi d'autre: le site, via le Dayan Wolff, a autorisé l'achat de saumon fumé sans certification rabbinique, au vu des contraintes légales et administratives pesant sur le saumon fumé en Europe qui rend impossible d'anciennes pratiques telles l'enduit de saindoux sur le saumon.

Deux sites plutôt complémentaires, disposant chacun de leur marotte halakhique et qui rendent un fier service aux Juifs français pratiquants, on pourrait finalement conclure là-dessus.

Mais il faut creuser. Car les profils de ces deux sites sont très différents. Et certaines divergences apparaissent si on veut bien examiner attentivement certaines questions, certaines réponses et certaines...censures...
Sur Cheela.org, rien à dire, c'est quasiment toutes les questions qui sont publiées, les rabbanim n'hésitant parfois pas à aller au charbon pour répondre à certaines questions un peu "chaudes" et dont les réponses ne sont parfois pas très en phase avec une oreille "occidentalo-humaniste". Les réponses sur l'usage du préservatif ou sur la question de savoir s'il est permis de sauver un non-Juif le jour du Chabbat sont admirables du point de vue de la rédaction et de la pédagogie. De même, la tendance affichée de Cheela étant une orthodoxie "sioniste-religieuse", suivant les enseignements du Rav Kook, l'insertion du judaïsme dans la vie quotidienne et la capacité à accepter la contradiction argumentée même sur des sujets un peu "limites" est clairement avérée.
Bien entendu, ce positionnement est clairement assumé: à des questions portant sur le statut halakhique de Yom Haatzmaout (la fête d'indépendance de l'Etat d'Israël), nul doute n'est permis, nous sommes sur un site sioniste pour qui le Hallel (les louanges dites pendant les jours de fêtes) doit être récité. Cela ne fait pas l'unanimité chez tous les décisionnaires, mais Cheela assume, c'est le principal.
Si l'on doit vraiment trouver des faiblesses, notons quelques rares contributeurs dont le français s'est un peu perdu au contact de la vie israélienne et dont les fautes de grammaire ou d'orthographe ne sont pas du meilleur effet. Mais il ne s'agit pas de la majorité des rabbanim, loin de là.

Malheureusement sur Téchouvot, la situation n'est pas aussi brillante. D'une ligne plutôt "Harédi", que certaine traduisent improprement par ultra-orthodoxes, le filtre est beaucoup plus sévère...notamment lorsque les questions portent sur des sujets abordant la question sioniste (les Harédim sont en délicatesse avec ce sujet) ou sur les modalités de modification de la Halakha.

Quelques exemples vécus:
- Une réponse sur Hanouka dans laquelle on insistait sur la dimension nationale de Hanouka n'a pas été publiée. Comme ça, cela n'a l'air de rien, mais il s'agit d'un point de divergence fondamentale entre sionistes et non-sionistes. Dire que Hanouka est une fête de libération nationale, et pas seulement un fête basée sur un miracle qui parle d'une fiole d'huile, peut justifier une ouverture vers l'officialisation de la fête de Yom Haatzmaout (fête d'indépendance de l'Etat d'Israël) d'un point de vue halakhique. Pourtant, même si elle n'est pas très populaire, une position halakhique non sioniste est possible et peut parfois être argumenté avec beaucoup de pertinence. Pourquoi ne pas vouloir l'exposer ?
- Les questions halakhiques politiques comme celles portant sur le désengagement de Gaza n'ont pas été publiées non plus.
- On peut lire sur Téchouvot une phrase phénoménale: "Vous constatez bien vous-même que le peuple juif dans son ensemble se sent très bien dans l’application des décisions des sages de la Michna et de la Guemara". Incroyable de lire ça lorsque moins de 30% de la population juive mondiale est aujourd'hui soumise aux Mitzvots. Comment ne pas être lucide à ce point là sur l'état du peuple juif ? On retrouve malheureusement ici en filigrane un des principaux reproches fait aux Harédim au sein du monde orthodoxe: leur insensibilité chronique à l'évolution du peuple juif.

Bref, à la notable exception de Jacques Kohn dont les interventions sont toujours fines, pertinentes et distanciées, Techouvot.com a encore beaucoup d'efforts à faire avant d'arriver au niveau de maturité des sites de réponse orthodoxes anglo-saxonnes.
Encore une fois, qu'on me comprenne bien: l'idée n'est pas tant de réfuter une idéologie particulière que de pointer du doigt un certain manque d'ouverture à la discussion et d'une incapacité chronique à exposer ses thèses sans dogmatisme. Comment s'enorgueillir de traverser le Talmud, oeuvre dialectique par excellence, et d'avoir peur d'assumer certaines discussions et d'avoir un regard lucide sur le monde juif ?

PS: Pour ceux que ça intéresse, les réponses aux questions halakhiques en début d'article

1) Ai-je le droit de secouer ma nappe à l'extérieur de mon balcon le jour du Chabbat ? Non
2) A-t-on le droit de consommer de la nourriture le jour du Chabbat issue d'un réfrigérateur qui s'éclaire lorsque la porte s'ouvre ? Oui si le réfrigérateur a été ouvert sans savoir que la lumière allait s'allumer. Non autrement.
3) Lorsqu'un steak a été servi dans de la vaisselle destinée à des mets lactés, puis-je manger le steak ? Puis-je conserver l'assiette si le steak était à moins de 45° ? Cela change-t-il quelque chose si l'assiette n'avait pas été utilisé pendant 24 heures antérieures ?
Le steak peut être mangé uniquement si l'assiette n'avait pas été utilisée dans les 24 heures auparavant. En revanche, l'assiette doit être jetée dans tous les cas sauf si le steak avait une température inférieure à 45° au moment où le steak a été mis en contact avec l'assiette

lundi 1 janvier 2007

Le dernier des Camondo de Pierre Assouline

En ce début de 21ème siècle au sein de la communauté juive française, il est de bon ton de s'extasier devant la prolifération de commerces et de lieux communautaires au sein du XVIIème arrondissement de Paris.
Alors qu'ont subsisté pendant longtemps quelques pionniers tels la Brasserie du Belvédère ou la boucherie Berbèche, depuis l'an 2000 environ, c'est l'explosion.

Allez, un petit recensement, même si ne vous inquiétez pas, je mettrai un peu de rouge dans le message pour les tunisiens un peu superstitieux:
- la rue Jouffroy d'Abbans, fief historique de Berbèche est désormais investi par plusieurs restaurants (Sushi West, Naty's Bagel, Daily's Café, et pas très loin Papy Youda), traiteurs (Dado's Café et Charles Traiteur)
- Les synagogues historiques sont désormais bondés (rue Barye, le Centre Rambam rue Galvani ou encore le Beth Hamidrach Lamed rue Bayen)
- Sans parler de la toute récente Maison Moadon ou des autres restaurants présents dans d'autres rues du XVIIème (le vaisseau amiral de Sushi West avenue de Villiers, le Tib's rue Bayen, le meilleur chinois cacher à mon goût Missada rue Laugier, etc, etc...)

Évidemment j'en passe. Mais lecteur, vous m'objecterez avec raison que vous êtes venus sur ce billet pour un ouvrage de Pierre Assouline et que pour le moment, vous ne voyez pas bien ce que ce pseudo Guide Michelin du Cacher a à voir avec Le Dernier des Camondo (ed. Gallimard).


J'y viens: les Juifs du XXIème siècle sont des petits joueurs.

Ce que Pierre Assouline aborde dans son livre, plus que la destinée d'une famille juive au 19ème (les Camondo donc), c'est l'histoire souvent méconnue des grandes familles juives parisiennes.
Les Camondo bien sûr, mais aussi les Pereire, les Rotschild, les Cahen d'Anvers ou les Fould.

Plus précisément, c'est le parcours de familles juives Séfarades, venus d'Istanbul ou du Sud-Ouest de la France après le Portugal et l'inquisition des Juifs d'Espagne, dans cette France terre d'asile et pays des droits de l'homme.

Les Camondo, banquiers dès l'Empire ottoman, s'installent en France et prospèrent dans le même métier, stimulés par la révolution industrielle.

Pourquoi ce bouquin est fascinant ? Parce que même si l'histoire est méconnue, on a l'impression de la connaître par coeur si on a bien lu l'épopée de Joseph, de ses frères et de leur installation en Egypte, dans un autre livre bien connu.
Ou comment des Juifs conscients de leur identité arrivent dans un pays qui est la gloire des nations. Où l'on suit leurs patients efforts, parfois démesurés, pour assimiler les codes et les habitudes de la grande bourgeoisie.
Bien entendu, leurs efforts sont couronnés de succès et rapidement, on en vient à inviter les Camondo aux grands évènements qui animent cette micro-société, leur réussite matérielle apparaît au grand jour, notamment grâce aux superbes hôtels particuliers érigés à l'intérieur du Parc Monceau.
Pour vous en faire une idée, vous devez bien entendu passer devant le 63 rue de Monceau où se tient le musée Nissim de Camondo. L'ancien hôtel particulier de la famille Camondo est une véritable splendeur: comment imaginer qu'il y a un siècle, vivaient des familles juives séfarades dans la Plaine Monceau et qu'elles menaient parfois la danse dans ce curieux manège que sont les us et coutumes de la grande bourgeoisie française ?

Bref, c'est un monde englouti, comme le monde de Joseph une fois que le livre de l'Exode commence. Un petit rappel ?

1 Voici les noms des fils d'Israël, venus en Égypte avec Jacob et la famille de chacun d'eux:
2 Ruben, Siméon, Lévi, Juda,
3 Issacar, Zabulon, Benjamin,
4 Dan, Nephthali, Gad et Aser
5 Les personnes issues de Jacob étaient au nombre de soixante-dix en tout. Joseph était alors en Égypte
6 Joseph mourut, ainsi que tous ses frères et toute cette génération-là
7 Les enfants d'Israël furent féconds et multiplièrent, ils s'accrurent et devinrent de plus en plus puissants. Et le pays en fut rempli
8 Il s'éleva sur l'Égypte un nouveau roi, qui n'avait point connu Joseph
9 Il dit à son peuple: Voilà les enfants d'Israël qui forment un peuple plus nombreux et plus puissant que nous
10 Allons! montrons-nous habiles à son égard; empêchons qu'il ne s'accroisse, et que, s'il survient une guerre, il ne se joigne à nos ennemis, pour nous combattre et sortir ensuite du pays.
13 Alors les Égyptiens réduisirent les enfants d'Israël à une dure servitude


Oserais-je résumer la dynastie des Camondo en ces termes ?

1 Voici les noms des Camondo venus en France avec Moïse de Camondo:
2 Abraham-Behor et Nissim
3 Leurs enfants nés en France Isaac et Moïse
4 Moïse de Camondo mourut, ainsi que tous ses frères et toute cette génération-là
5 Les enfants Camondo (Nissim et Béatrice) s'accrurent et devinrent de plus en plus puissants. Et le 17ème arrondissement en fut rempli
6 Il s'éleva sur l'Allemagne et la France de nouveaux régimes qui ne voulaient pas connaître l'apport des Camondo
7 Ils dirent à leur peuple: voyez ces Juifs qui complotent contre nous afin de conquérir la terre et nous anéantir
8 Allons, réagissons
9 Auschwitz

Vous l'aurez compris, ma sympathie habituelle va jusqu'à dévoiler la fin du livre: les Camondo n'existent plus. Leur aventure s'est terminée dans les terres froides de Pologne, comme des millions d'autres.

Nous n'échapperons donc pas à la question: l'histoire juive suit-elle des schémas d'existence pré-établis ? Ces lignes de force qui mettent en garde les Juifs contre l'impossibilité de s'intégrer correctement sous peine de périr ?

C'est le sous-jacent de l'ouvrage selon ma lecture (je doute que Pierre Assouline y adhère). Et si la réponse semble évidente pour les Camondo, l'Histoire l'ayant malheureusement prouvé, il reste à savoir si la conclusion est aussi valable pour le revival juif parisien actuel.

Dans tous les cas, Pierre Assouline a le grand mérite de ressusciter une époque dont le souvenir n'existe plus, y compris dans les mémoires juives parisiennes.
Ne plus hésitez: courrez lire ce livre et ne soyez pas rebutés pas les premières pages descriptives du musée, un peu rébarbatives pour qui ne connaît pas encore l'histoire. Mon conseil: sautez ces pages et revenez-y lorsque vous aurez terminé l'ouvrage...lorsque des pensées vous accompagneront longtemps après avoir refermé la dernière page, ce qui est toujours la marque des livres précieux.

Le blog de Pierre Assouline: http://passouline.blog.lemonde.fr