dimanche 8 juillet 2007

Etre français en Israel: un concert de Ravel à Jérusalem

Je reviens d'un voyage assez court en Israël, mais qui s'est avéré extrêmement intense. Beaucoup de choses à raconter, mais d'abord une expérience assez insolite.

Arrivé dans la nuit de jeudi à vendredi, au lit à 3h30 du matin, il a fallu me lever à 9h30 pour pouvoir être à 10h30 au Théâtre de Jérusalem pour un concert de Ravel (mes grands-parents avaient des places depuis longtemps).

Le concert commence à 11h00. Déjà cette heure matinale est étonnante. Mais ce qu'il y a d'encore plus sympa, c'est ce qui se passe avant: dans le grand hall du Théâtre, tout le monde est servi avec du café, du lait et de succulentes patisseries !

C'est donc avec le ventre plein que nous rentrons dans la salle de concert. Au programme:
- Pavane pour une infante défunte
- Concerto pour piano en Sol majeur
- Boléro (le fameux)

Le tout sous la conduite de Gianandrea Noseda, chef d'orchestre titulaire de l'orchestre philarmonique de la BBC à Manchester. Et pour le concerto pour piano: Jean-Yves Thibaudet, Premier prix du Conservatoire, dont une des professeurs était une collaboratrice de Ravel, Lucette Descaves.

Le concert était extraordinaire, d'autant que c'est la première fois que je voyais le Boléro s'exécuter sous mes yeux avec toute la puissance dont est capable un véritable orchestre philarmonique sur cette partition si progressive et explosive.

Mais ce qui a été aussi frappant, c'est l'opportune présentation du concert par Emmanuel Halperin, journaliste israélien d'origine française de Ravel et de son oeuvre.
C'est d'abord un véritable plebiscite pour la France et la musique française, en hébreu devant une salle de concert remplie d'israéliens.
"La musique française est très spécifique. Elle ne ressemble à aucune autre. Elle est d'abord le produit de ce pays si particulier qu'est la France, un pays où n'importe qui partageant les valeurs morales et politiques de ce pays peut se dire français. Personne n'irait penser que Ravel, fils d'une espagnole n'est pas français. Qui oserait dire qu'Offenbach n'est pas le chantre de la vie parisienne du second empire ? Et pourtant, il descend de juifs allemands eux-mêmes issus de la ville du Gaon de Vilna.
Rendez-vous compte que la France est un pays où l'identité nationale demeure un concept tellement puissant qu'un ministère lui est désormais dédié, qu'un homme né de père hongrois et d'une mère descendantes de Juifs de Salonique peut se prévaloir d'être pleinement français, et non seulement ça, mais d'être le Président de la France, son représentant le plus éminent !"

Il faut se retrouver en Israël, pour entendre un rappel de pourquoi être français peut procurer de la fierté et quel est l'horizon vers lequel peut et doit tendre ce pays si particulier qu'est la France.
Emmanuel Halperin se lança ensuite dans une explication sémantique du mot "charme". Pour lui, c'est un des atouts de la France. Le mot "charme" ne se laisse pas traduire par le mot "Hen" en hébreu, qui veut plutôt dire la grâce. Le "charme" induit une dimension supplémentaire de magie, d'extra-naturel, au point d'appeler également charme certains sortilèges lancés par les sorcières ou les fées.

Le charme, ose Halpérin, c'est le meilleur qualificatif que l'on puisse trouver à la musique française. Pourquoi pas.

Reste que mon bref séjour à Jérusalem commençait fort bien et que je sortais vendredi après-midi encore plus enchanté par le dynamisme israélien et revigoré quant aux atouts de la France.

A suivre...