Concept forgé autour des notions d'auto-dérision, de plaisanterie autour du désespoir, d'éloge des figures dantesque que sont la mère juive ou l'idiot du shtetl: disons qu'au final la définition en est tellement large qu'il serait presque possible de bâtir un recueil de toutes les blagues du monde toutes provenances confondues, de changer les noms des différents protagonistes en Cohen, Lévy, Bensoussan ou Berenstein, de titrer "Humour juif" sur la première de couverture et de vendre ça à des milliers d'exemplaires.
Oui, je sais, Marc-Alain Ouaknin ne s'en est pas privé, il a d'ailleurs poussé l'audace jusqu'à commettre le crime deux fois: il y a désormais sur le marché deux bibles de l'humour juif.
Si ça c'est pas une preuve du talent millénaire des juifs pour les affaires, je me demande ce que c'est...
Bref, donc l'idée, c'est d'essayer de revenir à la véritable source de l'humour juif, c'est à dire le Talmud. C'est là que sont consignées discussions enflammées, parfois loufoques, parfois étranges, souvent sans pitié pour l'adversaire intellectuel et toujours en prenant bien soin de mettre à distance tout pathos ou tragique. Avec un moyen formidable: l'humour (juif, le vrai).
Alors voici une petit blague, assez connue dans les milieux Yéchivistes, mais qui reflète bien une sorte d'humour juif dont les racines séculaires ont ensuite perduré.
Quelques éléments de traduction pour que tout le monde comprenne bien:
Havrouta = mode d'étude en Yéchiva qui s'apparent à un binôme: deux étudiants étudient régulièrement ensemble et s'affrontent sur l'interprétation à donner à un texte
Erouv = pour pouvoir passer outre l'interdiction de ne pas porter Chabbat, il est possible de contruire une barrière autour d'une ville pour faire de celle-ci une sorte de domaine privé dans lequel il sera possible de porter. Pour que le Erouv soit valide, il faut qu'il soit construit selon des règles précises et évidemment vérifié et validé par un Rav reconnu.
Quelqu'un qui porte à l'intérieur d'un Erouv validé par un Rav est donc "Somekh" sur ce Rav, c'est-à-dire qu'il accepte de s'appuyer sur la décision de ce Rav.
C'est donc l'histoire de deux étudiants fervents en Yéchiva, qui étudient en Havrouta (en binôme) depuis assez longtemps: Moché et Shlomo.
Un jour, Moché, très tourmenté, se tourne vers Shlomo:
"Shlomo, il faut que je t'avoue quelque chose.
- Ah bon, quoi Moché, c'est grave ?
- Oui, assez
- Vas-y, je t'écoute
- En fait Shlomo....je ne suis pas juif
- Quoi ?
- Bah oui, je ne suis pas juif
-Mais enfin Moché qu'est-ce que tu racontes ? Toi, Moché, le grand talmudiste, qui passe ses journées sur des pages de Guemara, tu n'es pas juif ?! Mais enfin, tu sais bien que ce que tu me racontes ne tient pas debout !
- Et pourquoi cela ?
- Parce que tu sais aussi bien que moi Moché qu'un goy n'a pas le droit de respecter le Chabbat sous peine de mort !! C'est un passage qu'on a même étudié ensemble. Et toi, je te connais bien, tu fais Chabat très scrupuleusement, plus que n'importe qui. Si tu es goy comme tu l'indiques, tu es donc condamnable à mort.
- Eh bien non Shlomo. Ca c'est ce que tu crois. Mais en fait, tous les Chabbat, je faisais bien attention à conserver un mouchoir dans ma poche pour transgresser l'interdiction de ne pas porter. Je transgressais donc Chabbat toutes les semaines.
- Mais c'est une ânerie, tu sais bien que dans la ville il y a un Erouv qui nous permet de porter
- Akhh, ça ne va pas non, je ne suis pas "somekh" sur ce Rav !!
Commentaire d'un de mes maîtres: celui-là, il n'a pas besoin de conversion, il est juif direct !
1 commentaire:
l'absurde, en toute simplicité.
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